E-marchands : faut-il confier vos données à Google et Facebook ?

Les deux plateformes risquent-elles de réutiliser vos données pour vos concurrents ? Quelles informations leurs fournissez-vous déjà ? Comment vous protéger à l’avenir ? 

Google et Facebook ayant des modèles économiques avant tout publicitaires, ils sont amenés à collecter de plus en plus de données auprès de leurs clients annonceurs. Parmi les informations que les marchands leur transmettent déjà, la première est tout simplement ladite publicité, qui elle-même va générer plusieurs données : d’une part qui lui est exposé, d’autre part qui clique ou pas. « Ces données sont collectées par Google et Facebook, et l’annonceur doit négocier pour les obtenir » explique Thibaut Munier, cofondateur et DG de 1000mercis.

 

munier 1000mercis 225Thibaut Munier, DG de 1000mercis © S. de P. 1000mercis

 

 

Par ailleurs, l’e-commerçant va communiquer des données de transformation à Google et Facebook, qui placent des tags sur les pages du site, tunnel de conversion compris. Mais si les deux plateformes essaient d’obtenir une meilleure vision de ce qui se passe chez les annonceurs, c’est dans le but de mieux les servir, assure Thibaut Munier.

Qui analyse : « C’est du donnant-donnant et le rapport de force se construit petit à petit, avec les avancées technologiques et les besoins des sites ».

 

D’autre part, le catalogue produit contient également des données importantes. Que Google les récupère en tant que données publiques sans demander leur avis aux marchands ou que ces derniers les transmettent, par exemple pour personnaliser leurs bannières publicitaires sur Facebook en fonction de leur catalogue, il s’agit encore d’un bloc de données supplémentaire dont les deux plateformes peuvent prendre possession. « Et pour les services de people-based marketing de plus en plus nombreux, comme les ‘custom audiences’ de Facebook, les marchands sont aussi amenés à charger non plus leurs produits mais leurs clients, afin de cibler soit leurs clients soit leurs non-clients », ajoute Thibaut Munier.

 

 

Négocier et ne pas tout donner

A quoi dès lors le marchand doit-il veiller ? D’abord, à bâtir un rapport de force lui permettant de récupérer auprès de Google et Facebook les données que génèrent ses publicités. Et bien sûr à les utiliser, idéalement en les déversant dans sa DMP, qu’il alimentera avec un maximum d’informations.

 

 

« Google et Facebook en savent plus que le marchand sur ses prospects »

« Entre les tags et les dispositifs d’identité unifiée comme Facebook Connect et Google+, Google et Facebook ont accès au parcours continu de l’internaute et savent même ce qu’il fait avant et après avoir visité un site marchand, remarque Christophe Camborde, cofondateur et PDG d’Ezakus. Ils en savent donc davantage que le marchand sur ses prospects. » Pour Thibaut Munier, raison de plus pour bien réfléchir à quels tags mettre sur son site. « Le pire est de tout taguer et de ne rien en faire. Si on met des tags, il faut les utiliser, faire des tests et se battre pour récupérer des informations dans l’autre sens », recommande-t-il. Conseil très similaire à propos du catalogue produit (et de la base clients) : se demander si on le charge ou pas et avec quelle granularité. Des questions à considérer aussi à l’aune du contexte concurrentiel plus ou moins sensible du marchand, bien sûr.

 

 

La valeur (et la marge) pourrait être transférée avec les données

Le marchand court-il le danger de perdre une partie de sa connaissance client au profit de Google et Facebook ? Christophe Camborde se veut d’abord rassurant : « Jamais ils n’utiliseront les données d’un Cdiscount pour fournir un meilleur service à un Rueducommerce. Garder un secret pareil serait impossible. » En outre, ce qui serait mauvais pour les marchands le serait à terme aussi pour Google et Facebook qui, s’ils « tuaient » leurs clients, n’auraient plus de revenus publicitaires à engranger.

 

camborde ezakus 225Christophe Camborde, PDG d’Ezakus © S. de P. Ezakus

« En revanche, une dépendance très forte des marchands va se créer envers Google et Facebook, qui finiront par mieux connaître leurs clients qu’eux, anticipe le PDG d’Ezakus. Lequel prend l’exemple de BigQuery. Cet équivalent de Google Analytics en big data est déjà capable de répondre à une requête du type : montre-moi mes clients qui ont dépensé plus de 200 euros ces quatre derniers mois. « Pour un marchand, pourquoi ne pas utiliser cela plutôt que son CRM interne ? Or avec chaque nouveau service fourni par les deux plateformes, avec chaque morceau de connaissance client et donc de valeur qui se transfère chez elles, c’est une partie de la marge du marchand qui partira aussi chez elles », souligne Christophe Camborde.

Raison pour laquelle il est urgent de monter en expertise sur ces sujets, répond Thibaut Munier. Le marchand est obligé de fournir des données, mais il doit être conscient de ce qu’il donne et de ce qu’il en retire. Pour le DG de 1000mercis, « il faut savoir quelles données ont quelle valeur et comment être pertinent dans leur utilisation. Et éventuellement se doter d’outils pour cela, au premier rang desquels une DMP, meilleure façon pour l’annonceur de protéger ses données. A ces conditions, il est possible d’en retirer des bénéfices. » Le dirigeant établit ainsi un parallèle avec les marketplaces. Certains marchands y commercialisent tout leur catalogue et transmettent leur valeur à Amazon, certains refusent tout en bloc et se privent d’un apport de revenus… et d’autres ne donnent pas tous leurs meilleurs prix, pas tout leur catalogue, et jouent sur plusieurs paramètres afin d’en sortir gagnants.

 

 

« On ne peut confier son CRM ou sa DMP à Google ou Facebook »

D’autant que pour Christophe Camborde, pas moyen de faire sans Google et Facebook. « C’est une fatalité, les marchands sont obligés d’y aller. Ceux qui bénéficient d’une clientèle très fidèle, sur une niche, pourront s’en passer. Pas les gros généralistes. »

 

 

Se renforcer pour mieux se protéger

Un plan d’action se dégage donc : répartir ses investissements pour ne pas dépendre d’une seule plateforme et travailler la fidélisation et le lien direct avec les consommateurs. « Un fan n’est pas un client », insiste Thibaut Munier, considérant pour sa part qu’on ne peut confier son CRM ou sa DMP à Google ou Facebook. « L’actif du marchand, c’est sa base de clients, sa DMP et son expertise dans ses investissements publicitaires. » Et de marteler : « il existe beaucoup de manières d’être exigeant dans sa relation avec Google et Facebook et beaucoup de manières d’être actif pour tester des choses nouvelles et mesurer ce qu’on en retire. »

Le nombre extrêmement restreint de marchands français disposant d’une DMP montre toutefois que même s’ils sentent qu’il leur faut organiser et protéger leurs données, ils n’investissent encore que très peu dans la data et misent en majeure partie sur le court terme : la publicité. La Redoute a une DMP, selon nos informations Carrefour et Voyages-Sncf.com y travaillent… et Cdiscount et la Fnac y ont réfléchi. La barrière de protection data des e-commerçants français n’est pas encore en place.

 


Expert Informatique assermenté et formateur spécialisé en sécurité Informatique, en cybercriminalité et en déclarations à la CNIL, Denis JACOPINI et Le Net Expert sont en mesure de prendre en charge, en tant qu’intervenant de confiance, la sensibilisation ou la formation de vos salariés afin de leur enseigner les bonnes pratiques pour assurer une meilleure sécurité des systèmes informatiques et améliorer la protection juridique du chef d’entreprise.

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Source : http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/donnees-e-commerce.shtml?een=4a4b0e45c54d9fed8fc26819a6b6f84f&utm_source=greenarrow&utm_medium=mail&utm_campaign=ml50_e-marchandsetle

 

 

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