Quelle réponse face aux survols illicites de drones ?

La multiplication de vols de drones inconnus et leur médiatisation inquiètent une filière française dont la croissance a été favorisée par l’existence d’une réglementation jusque-là assez libérale. 

D’objet sympathique, le drone est presque devenu l’ennemi public numéro un depuis quelques semaines, face à la multiplication de vols aussi illicites que mystérieux. Une mini-psychose qui touche une partie de la population d’abord, certains imaginant déjà ces mini-appareils sans pilote se transformer en nouvelles armes aux mains de terroristes. Chez les policiers et les gendarmes ensuite, qui n’ont jusqu’à présent arrêté aucun responsable des soixante vols recensés. La médiatisation du phénomène inquiète enfin une filière en pleine croissance qui avait jusqu’alors bénéficié de la compréhension d’une administration plutôt bienveillante.

Depuis avril 2012, en effet, une réglementation assez libérale encadre l’utilisation des drones. Fruit d’une concertation entre la Direction générale de l’aviation civile et les professionnels, celle-ci comprend quatre scénarios d’utilisation. Tous imposent une altitude inférieure à 150 mètres mais autorisent, dans certains cas, le vol en dehors du champ de vision du pilote. Jusqu’à 1 kilomètre et même « hors vue » sur plusieurs dizaines de kilomètres dans certains cas. Dotée d’un cadre légal solide, la filière a connu un véritable boom avec une cinquantaine de constructeurs de drones et, surtout, 1.300 sociétés de services enregistrées auprès de la DGAC. Celle-ci imposant la constitution d’un dossier, inspiré de celui de l’aviation, détaillant le type de drone utilisé, la qualification des pilotes, les procédures mises en place… La Fédération professionnelle des drones civils (FPDC) revendique 300 membres et en espère 500 d’ici à la fin de l’année. Et estime à 3.000 le nombre d’emplois créés par la filière. C’est justement cette dynamique que les professionnels craignent de voir freinée par des pouvoirs publics susceptibles de réagir aux événements actuels en durcissant la réglementation. « Une hypothèse toutefois peu fondée puisque l’administration fait bien la différence entre une filière qui travaille dans le cadre réglementaire et les auteurs de ces actes irresponsables », relativise Emmanuel de Maistre, fondateur de la Fédération professionnelle des drones civils.

L’autre risque étant que l’opinion publique bascule et pousse les pouvoirs publics à plus de sévérité. Même si, en parallèle, le grand public semble avoir déjà adopté le drone. A lui seul, Parrot, l’un des principaux acteurs du marché du drone de loisirs, a déjà vendu près de 1 million d’appareils en quatre ans.

 

 

Les professionnels montent au créneau, en rappelant que ces dernières années des milliers de vols se sont déroulés sans incident. Il reste qu’un drone n’est pas un objet anodin et qu’il engendre des risques : blessure en cas de choc ou de chute, perturbation du trafic aérien, distraction des automobilistes… Une soixantaine d’enquêtes judiciaires ont d’ailleurs été menées depuis trois ans, dont six se sont soldées par une confiscation du matériel et deux par des peines de prison avec sursis. L’une pour un drone qui s’était écrasé sur la piste de l’aéroport de Montpellier et l’autre à l’occasion de l’échouage d’un paquebot sur une plage de Bayonne. Le propriétaire avait voulu filmer le navire, entravant du même coup les opérations de sauvetage. Et si en France la police n’a jamais enregistré d’accident, on l’a parfois frôlé. A l’image de ce qui s’est passé en Catalogne en 2013, lorsqu’un drone de plusieurs kilos qui filmait des festivités est tombé de 30 mètres de haut à quelques centimètres d’une petite fille.

Les drones vont de toute façon voir le paysage changer. Impuissant depuis les premiers survols de sites sensibles, notamment des centrales nucléaires, l’Etat ne compte plus se laisser faire. Le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) a été mandaté par le Premier ministre pour évaluer la menace et organiser la riposte « à moyen et long terme ». Les pistes sont d’abord réglementaires : immatriculation, enregistrement des drones, obligation de s’assurer.

Dans le domaine du drone de loisirs, pourquoi ne pas rendre obligatoire la note très bien faite de la DGAC recensant les 10 commandements pour l’usage d’un drone en France ? Les pistes sont aussi techniques avec la possibilité de les doter de puce d’identification ou de transpondeur, pour les rendre détectables. Même si ces dispositifs peuvent être contournés. « La grande mode étant désormais de fabriquer son drone en kit à partir de pièces achetées sur Internet », constate un spécialiste de la lutte contre les drones illicites. Dès lors, le SGDSN a aussi pour mission d’évaluer des dispositifs techniques, pour neutraliser les drones ou protéger les sites sensibles. Des technologies existent : brouillage du signal GPS, radars actifs ou passifs, voire laser ou canons à eau. « Aucune solution ne semble disponible immédiatement même si des industriels assurent en avoir », indique le SGDSN. Pour vérifier leurs dires, une série d’expérimentations sont déjà en cours avec l’appui technique du centre français de recherche aérospatiale (l’Onera). Le SGDSN a voulu aller plus loin en allouant 1 million d’euros à la recherche. Quelque 23 entreprises ont ainsi répondu à un appel à projets « Protection de zones sensibles vis-à-vis des drones aériens » lancé par l’Agence nationale de la recherche. Les candidats devraient être choisis ces jours-ci et se voir financer pour des projets sur dix-huit mois au maximum.

La réglementation va également évoluer à l’échelon européen. La Commission européenne s’en préoccupe et vient de réunir tous les acteurs la semaine dernière en Lettonie. L’objectif étant de réfléchir à une uniformisation des pratiques, très différentes d’un pays à l’autre. Avant cela la DGAC devrait encore faire évoluer la réglementation française. Avec pour l’instant des pouvoirs publics qui semblent prudents. « On ne veut pas faire abstraction de la filière et nuire à son développement », entend-on aussi bien au SGDSN qu’à la Gendarmerie des transports aériens (GTA).

 

 

Les points à retenir

Face à la multiplication des vols illégaux de drones, le Premier ministre a chargé le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale d’évaluer la menace et d’organiser la riposte.

Les pistes sont d’abord réglementaires : immatriculation, enregistrement des drones, obligation de s’assurer.

Mais les réponses sont aussi techniques avec la possibilité de les doter de puce d’identification ou de transpondeur, pour les rendre détectables.

 

 

 

 


Expert Informatique et formateur spécialisé en sécurité Informatique, en cybercriminalité et en déclarations à la CNIL, Denis JACOPINI et Le Net Expert sont en mesure de prendre en charge, en tant qu’intervenant de confiance, la sensibilisation ou la formation de vos salariés afin de leur enseigner les bonnes pratiques pour assurer une meilleure protection juridique du chef d’entreprise.

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Source : http://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0204206144122-quelle-reponse-face-aux-vols-illicites-de-drones-1100859.php

Par Frank Niedercorn Journaliste au sein du service Prospective des « Echos »

 

 

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